Homélie de l’Assomption – année C

2018-01-28T20:21:22+01:0015 août 2016|

Mes chers frères et sœurs !

Dans la vie de l’Eglise Catholique et au cours de l’année liturgique, Marie est exaltée et vénérée sous divers titres et dans de multiples dévotions depuis la naissance de l’Eglise. Parmi les icônes à travers lesquelles nous vénérons la Vierge Marie, celle d’Assomption est, à mon avis, la plus significative parce qu’elle exprime l’œuvre, la bienveillance, la générosité et la magnificence de Dieu envers Marie, et par ricochet, envers nous aussi, parce que l’Assomption de Marie est un appel pour chacun de nous, si nous laissons le Seigneur prendre place et naître dans nos cœurs comme Marie le fit après l’Annonciation de l’Ange Gabriel.

Cependant,  nous devons faire très attention, mes chers frères et sœurs. J’aime beaucoup Marie. Elle a une grande place dans ma vie d’homme, de baptisé et de prêtre. Et j’espère de tout mon cœur que chacun de mes paroissiens, et chacun de nous tous ici rassemblés pour cette solennité de l’Assomption, que lui accordons la place qu’elle mérite dans notre vie ! S’attacher à Jésus nous attache forcement aussi à sa Mère. On ne peut pas aimer Jésus et ne pas s’attacher à sa Mère ! Un chrétien est forcément un être marial !

Toutefois, nous ne devons pas faire de Marie une divinité. Marie n’est pas une  déesse.  Elle n’est pas la « quatrième personne » de la sainte Trinité. Cette tentation a existé et  existe dans beaucoup de dévotions mariale que l’Eglise canalise heureusement. Il y a eu et il y aura encore des déviations dans nos dévotions envers Marie. On l’a beaucoup reproché aux catholiques, et ces accusations n’étaient pas et ne sont pas toujours gratuites et sans fondement. Pour que Marie soit vraiment l’un de nous, elle veut être prise pour ce qu’elle est réellement : une simple petite paysanne comparable à toutes les autres jeunes filles de Nazareth. Marie est une fille normale, pas du tout extraordinaire. Elle est de de pauvre culture, une humble juive vivant simplement mais profondément sa foi en Yahvé.

Ce qui change tout, c’est la générosité infinie de Dieu envers cette fille de Nazareth parce qu’elle est choisie pour être la Mère du Verbe Incarné, du Dieu conçu dans la chair pour partager notre condition d’homme. Pour cela, Marie a dû adhérer librement à ce projet décidé par Dieu sans l’avoir consultée d’avance. Heureusement qu’Anne et Joachim l’avaient déjà préparée, à travers l’éducation reçue dans la maison familiale, à écouter Yahvé et à chercher toujours et d’abord sa Volonté. Marie a dû pour cela mettre une croix sur ce qu’elle pouvait avoir comme projets, accepter d’être exposée à quelques critiques, être pointée du doigt dans les rues de Nazareth,  mettre sa vie en danger en courant le risque de la lapidation selon la Loi de Moïse…Accueillir la volonté de Dieu, prendre une décision importante dans notre vie exige toujours des renoncements qui nous coûtent plus ou moins.

Pour nous aujourd’hui, cela fait partie de notre foi  et c’est tellement évident que Marie a conçu par la force du saint Esprit. C’est acquis pour nous tous aujourd’hui, je l’espère en tout cas  !  Mais c’est avec un recul, une vie de foi, des études, catéchèses,  des enseignements de l’Eglise, la lecture des Evangiles, des célébrations mariales… et une histoire qui dure depuis plus de 2000 ans.

Mais imaginez un peu les habitants de Nazareth qui retrouvent la petite sage Marie, fille de Joachim enceinte avant le mariage. Pensons un peu à la réaction de ses parents Anne et Joachim : des parents profondément éprouvés par cette situation, comme tous ces parents déboussolés par la vie affective et amoureuse de leurs jeunes adolescents: raillés par tout le monde à cause de leur fille qui fait la honte tout Nazareth. Imaginons les commérages des jeunes filles et femmes du village ! Pensons à Joseph son fiancé et qui construisait déjà la maison familiale pour le jour du mariage. Tout le monde voyait de grandes cornes qui avaient bien poussé sur sa tête ! Le loser de Nazareth ! La honte de la ville, pauvre Joseph le Charpentier!

La suite des événements n’est pas du tout facile dans la vie de Marie: un accouchement dans le froid de Bethléem, dans un hébergement de fortune au milieu des bêtes, la persécution de Hérode et le massacres des saints innocents, la fuite de la sainte famille, avec le bébé Jésus comme réfugiés en Egypte, les dures et littéralement blessantes paroles de Jésus à Marie et Joseph. Alors adolescent âgé de 12ans quand il se perd pendant trois jours dans le temple de Jérusalem, il dit  ses parents qui le retrouvent après trois jours apparentés à une fugue: «pourquoi me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous que je devais être au service de mon Père ». Il y a aussi la présence de Marie parmi les disciples avec les accueils et les refus d’Israël, le chemin de croix de Jésus avec cette terrible page de sa rencontre avec Marie, Il y a aussi la présence silencieuse de Marie auprès de la Croix pendant que Jésus expirait, les dernières paroles de Jésus à sa mère et à Jean avant de mourir («Fils voici ta Mère et Femme voici ton fils »)…

La vie de Marie interroge notre vie d’aujourd’hui. Elle nous ressemble dans les hauts et les bas de notre vie.  Nous pouvons, nous aussi, comme elle,  être toujours dans la grâce de Dieu si nous Le laissons, sans feintes ni demi-mesures, malgré nos fragilités et nos faiblesses, habiter et demeurer nos cœurs pour y naître chaque jour. Marie est une femme normale et ordinaire parce qu’elle est l’un de nous, semblable à chacun de nous dans ce qui fait le quotidien de notre vie. Elle est extraordinaire et merveilleuse simplement parce que la grâce de Dieu l’a touchée et as accompli en elle et par elle ses merveilles pour toute l’humanité que nous formons.

Ce qui est arrivé à Marie dans le mystère de l’Assomption que nous célébrons en ce jour nous montre bien que pour nous aussi, les portes du salut et de la gloire nous sont grandement ouvertes après notre pèlerinage en ce monde. Notre vie peut traverser joies et souffrances,  des hauts et des bas en ce monde qui passe, mais notre vocation est de partager, comme Marie, la glorification au ciel de son Fils et notre Seigneur.

Si comme Marie nous laissons Jésus naître dans nos cœurs, si comme elle nous prenons soin de Jésus à travers nos frères et sœurs que nous côtoyons, si comme elle nous écoutons la Parole de Dieu et la méditons dans notre cœur, si comme elle nous savons apporter la Bonne Nouvelle aux autres comme elle l’a fait avec Elisabeth lors de la Visitation, pas comme la télévision et nos médias qui ne nous donnent que les mauvaises nouvelles, des guerres, attentats, assassinats, meurtres, chômage, déprimes…si comme Marie nous sommes disciples à la suite de Jésus, si comme Marie nous accompagnons Jésus sur son chemin de croix, à travers nos propres croix et celles des autres, si comme elle nous accueillons le Saint Esprit comme au Cénacle, alors, comme Marie et par sa prière, nous partagerons la gloire de son Fils, Lui qui s’est fait homme pour que nous partagions la vie divine. Marie, Mère du Seigneur et Notre-Mère, nous te confions nos familles, notre communauté, notre pays, nos amis, ceux que nous aimons. Nous confions à  ta prière aussi  ceux qui ne nous aiment pas ou ceux que nous n’aimons pas assez, en particulier ceux qui nous font peur ou veulent nous tuer. Nous te confions tous les martyrs chrétiens d’aujourd’hui.

Amen.

Ancien curé de l'ensemble paroissial