Le temps des vacances est là. Et pourtant, pendant que certains s’imaginent comment profiter des vacances, quel genre repos prendre, la parole de Dieu vient nous bousculer dans notre imagination. Le Seigneur veut de nous tous des disciples et des messagers.
La première lecture nous parle du prophète Amos (Am. 7, 12-15). Tiré de son monde de bouvier, derrière ses troupeaux, il est envoyé par Dieu. Il doit aller à Béthel prêcher le droit et la justice. Sa nouvelle vie d’Envoyé de Dieu le met en difficulté avec toute la société. Il n’est pas le bienvenu dans le sanctuaire de Béthel. La conséquence, c’est qu’il lui est demandé par les siens, de partir, de vider le lieu, de déguerpir ; car ne faisant pas allégeance au prêtre Amazias, recteur de ce sanctuaire dédié aux idoles. Au risque de sa vie, il prend parole. Il rappelle qu’il est là pour le compte du Dieu d’Israël et que le message n’est pas à lui mais vient d’un plus fort, de sorte qu’il ne pouvait lui résister. Déclinant son identité de simple bouvier, inconnu du coin, il révèle son rôle de messager et sa mission de porte-parole, que dire ? Sa vocation de prophète ! Ses paroles sur le droit et la justice sociale et distributive dérangent les affaires du prêtre !
En effet, la Parole de Dieu bouscule ceux qui se sont installés dans leur confort. Par voie de conséquence, lorsqu’on dénonce des « magouilles », des projets malsains et suicidaires, ce ne sont que des représailles, des moqueries, des critiques négatives qui arrivent. Ailleurs, certains sont obligés de s’exiler. Dans le monde actuel où des puissants maintiennent des situations de guerres, des poches de résistances, des guérillas, des rébellions pour leur propre sécurité, l’Église et son Évangile, sont vus d’un œil interrogateur dédaigneux… Des nouveaux Amazias veulent neutraliser l’Église comme à l’époque d’Amos. Que de fois on entend dire que « l’Église est sortie de sa mission » lorsqu’elle se prononce, fidèle à sa foi et à sa doctrine sociale, sur telles ou telles questions sensibles ; que « ce n’est pas son rôle » et patati patata… Pendant qu’eux, cyniques, ils gardent bouche-bée face aux cris des opprimés, par-ci par-là, dans le monde. La réponse d’Amos est importante : « c’est Dieu qui m’a appelé et envoyé ». Pour dire, qu’il ne peut se taire.
Ensuite, l’Évangile entendu, présente un tableau presque similaire qui concerne l’appel et l’envoi. Il trace une ligne de conduite d’un Disciple, d’un Envoyé du Christ. Il donne les orientations à suivre pour être missionnaire. Nous lisons que Jésus envoie ses disciples deux par deux sur les routes du monde. Ils doivent partir avec un minimum d’équipement, pas grand-chose en tout : des sandales, un bâton et une ceinture. Ce qui signifie la souplesse, la fermeté et l’assurance dans le programme de Dieu mais aussi l’abandon à sa Grâce et à son amour. Il est inutile de s’encombrer de choses secondaires. Le vrai missionnaire doit s’attacher à l’essentiel. Rien pour séduire, rien pour attirer, rien pour se faire applaudir. Simplement aller à la rencontre des gens pour annoncer la bonne nouvelle. Cela parce que le Seigneur se sert de ce qui est faible pour réaliser des merveilles. Il est important de faire équipe. C’est pourquoi Jésus les envoie deux par deux. L’unique outil c’est la Bonne Nouvelle : « convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ». Évidemment, l’envoi des Douze n’est pas seulement l’envoi des apôtres. Le chiffre 12, nombre des apôtres choisis par Jésus, évoque les douze tribus d’Israël. Dans le contexte d’aujourd’hui, il évoque le Nouveau peuple de Dieu, l’Église fondée sur les Douze Apôtres. Nous en faisons partie dès le jour de notre Baptême. C’est donc le peuple de Dieu tout entier. A travers les Douze, c’est toute l’Église que Jésus envoie en mission. Nous sommes tous concernés. Et pour comprendre ce que le Seigneur attend de nous, il nous faut revenir à l’Évangile : « Étant partis, ils prêchèrent qu’il fallait se convertir, et ils chassaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d’huile sur les malades et les guérissaient » (Mc 6,12-13.) Car en effet, chaque baptisé est disciple et missionnaire. Nous sommes tous appelés par l’Esprit saint, envoyés faire des disciples, bâtir un monde de frères, à être Sel de la terre et lumière du monde, à bâtir un monde juste et fraternel. Pour y arriver, l’Église incarne sa triple mission, qui fait son identité : prophétique, sacerdotale et royale dans sa triple fonction : l’Enseignement, le Gouvernement et la Sanctification.
L’Église Notre Mère a cela comme mission. Sa mission consiste en cette écoute attentive de la voix de Dieu qui parle en nos cœurs, une voix tendre qui parle en nous demandant d’aller à la rencontre de nos frères. Visiter les malades, prier avec eux, compatir avec ceux qui souffrent, vivre la charité évangélique… Le pape François aime utiliser le terme « sortir », faire une sortie vers les périphéries. Et il y a beaucoup de périphéries autour de nous et en nous-mêmes. Comment procéder ? Il s’agit d’aller vers ceux qui ne fréquentent pas l’Église, vers les indifférents, vers ceux qui ne la fréquentent plus, pour de bonnes ou mauvaises raisons. Le disciple devra annoncer ce que lui-même vit déjà. Il est appelé à être un homme de foi et de témoignage, avoir une vie cohérente avec sa nature de chrétien et sa vocation d’être saint.
Ayant écouté la parole de Dieu, ayant compris la volonté de Dieu, le Disciple invente de nouvelles routes et n’attend pas simplement que les gens viennent à lui. Il est ouvert à la motion de l’Esprit, n’est pas centré sur lui, mais sur le Maître. Il s’aventure là où le Maître le précède (comme saint Paul). Et sous la forme d’un « rendre compte » de l’expérience chrétienne, de la joie d’être chrétien, il attire. Car, rien de ce que nous annonçons ne peut être annoncé en vérité, si on ne peut pas dire : Viens et vois.
Bien aimés de Dieu, prions aujourd’hui pour que la Parole se libère, car la Parole de Dieu ne doit pas être enchaînée par un quelconque ordre établi, une quelconque politique, afin que les fidèles du Christ que nous sommes, soient de vrais témoins capables de dénoncer ce qui ne marche pas. Que sous la conduite de l’esprit, le chrétien évite tout ce qui est indigne de ce nom, toutes les bassesses et scandales et ne cherche que la gloire de Dieu, lui qui vit et règne pour les siècles des siècles, Amen.