B – Saint Sacrement – « L’Eucharistie, une alliance scellée entre le baptisé et le Christ »

2018-06-09T14:24:56+01:009 juin 2018|

Mes chers frères et sœurs ! Nous avons besoin de l’Esprit saint pour comprendre que Dieu est communion, mystère trinitaire et d’amour infini. Dans un monde où nous sommes tellement en rivalité, en compétition, en conflit et en tension les uns contre les autres, nous avons besoin du Saint-Esprit pour imiter cette communion trinitaire dans nos familles, dans la société… Même dans nos communautés ecclésiales, dans l’Église, nous avons besoin du Saint-Esprit pour arrêter ce spectacle tragique d’un groupe de disciples qui se font la guerre, qui utilisent entre eux plus souvent la ruse du serpent plutôt qu’imiter la colombe, symbole de douceur, de tendresse et de paix. Nous avons besoin que le feu du Saint-Esprit descende sur chacun de nous pour le purifier, nous soutenir, nous encourager, pour construire la communion entre nous, pour faire grandir l’unité dans nos familles, nos vies de couple, dans nos groupes, mouvements et services. Cette unité-communion est toujours un don de Dieu, mais elle n’est jamais acquise et sans la grâce du Saint-Esprit et un effort constant et permanent, l’unité sera toujours un vœu pieu irréalisable.

Après avoir contemplé ce mystère d’amour et communion trinitaire dimanche dernier, l’Église nous invite aujourd’hui à prendre conscience d’un miracle extraordinaire, un grand mystère qui s’opère dans l’Église chaque fois que l’Eucharistie est célébrée. On pourrait se demander pourquoi instaurer une fête du saint Sacrement, alors que nous le vivons et le célébrons chaque fois qu’il y a la messe. La réponse, nous l’avons déjà dans l’évangile ! En fait, à force d’aller à la messe, nous risquons de banaliser et faire les choses de manière automatique, presque routinière, comme les disciples qui demandent à Jésus : « Où veux-tu que nous allions faire les préparatifs pour que tu manges la Pâque ?» Pour eux en effet, il s’agit d’un énième repas de Pâques comme d’autres déjà vécus. Ils sont tellement concentrés sur la préparation de ce repas de fête qu’ils n’arrivent pas à réaliser ce qui va réellement se jouer et se passer dans cette simple célébration.

Jésus, lui, sait qu’à travers ce repas, le pain et le vin, c’est lui-même qui se livre, dans un don total de sa propre vie, dans un amour infini et sans condition. Dans ce pain et ce vin, il anticipe ce qui va se passer sur la croix : donner sa vie pour l’humanité. Je ne voudrais pas vous choquer ou blesser, mais ces disciples nous ressemblent tellement. Nous sommes tellement habitués à la messe, à venir chaque dimanche, à se mettre en file, au moment de la communion, comme les autres, de manière mécanique et automatique… et aujourd’hui l’Église nous dit « stop, arrête ! » : Joseph, Jean, Antoine, Véronique…, as-tu conscience de ce que tu fais ? Réalises-tu vraiment ce que tu reçois ? As-tu conscience de qui tu prends dans la paume de ta main, sur ta langue ? Sais-tu qu’à travers ce bout de pain et vin consacrés, c’est Jésus lui-même en personne que tu reçois et qui vient demeurer en toi ?

L’Eucharistie est la source et le sommet de la vie chrétienne, nous rappelle le Concile Vatican II. C’est la modalité par excellence où le Seigneur Jésus se donne à nous aujourd’hui jusqu’à la fin de temps, avant que nous le contemplions de nouveau, face à face, dans le banquet des noces éternelles ! En attendant, il nous permet de le contempler dans l’Eucharistie! Alors, comment est-il possible qu’il soit devenu difficile de participer massivement et avec foi à l’Eucharistie ? Nous entendons, ou disons nous-même ne pas aller à la messe parce que nous trouvons les messes ennuyeuses, pas assez dynamiques, que les assemblées ne sont pas toujours sympathiques et accueillantes, un peu râleuses, que les homélies des prêtres ne sont pas toujours excellentes et de qualité, parce que certains chants de messes sont plus des recueils de deuil qu’une célébration de la joie pascale, que… des milliers des raisons… ! Toutes vraiment insuffisantes et en-deçà de ce qui se vit dans chaque messe célébrée. Ces raisons oublient ce qu’est vraiment la messe : lieu où Jésus lui-même se donne, indépendamment des chants, de l’assemblée, de l’homélie du prêtre, de l’accueil des assemblées habituelles et de nos qualités personnelles. Ne disons-nous pas d’ailleurs que nous ne sommes pas dignes de le recevoir, avant de nous avancer pour la communion ? C’est parce que le Christ se donne dans la messe que nous devons toujours soigner, mieux préparer, mieux célébrer la messe… Nous devrions faire des efforts pour que nos chants, nos gestes, nos paroles, nos homélies, notre participation soient adéquats et correspondent à ce Dieu qui nous aime et qui se donne à nous dans la messe.

En cette fête du Saint Sacrement, contemplons cet homme qui accepte de mettre sa maison à la disposition de Jésus pour qu’il y fasse son repas pascal : « Il envoie deux de ses disciples en leur disant : «Allez à la ville ; un homme portant une cruche d’eau viendra à votre rencontre. Suivez-le, et là où il entrera, dites au propriétaire :“Le Maître te fait dire : Où est la salle où je pourrai manger la Pâque avec mes disciples ?”Il vous indiquera, à l’étage, une grande pièce aménagée et prête pour un repas. Faites-y pour nous les préparatifs.» Nous ne connaissons pas le nom de cet homme. Il ouvre sa maison au Christ, dans une pièce qui est préparée pour accueillir le repas pascal où Jésus va se donner. Cet homme qui n’a pas de prénom symbolise et représente chaque chrétien qui accueille Jésus en recevant son corps et son sang, et cette pièce à l’étage représente l’âme de celui qui reçoit la communion pendant la messe. Ce qui se passe dans cet évangile est actualisé chaque dimanche, dans chaque messe célébrée et où nous recevons Jésus présent dans l’Eucharistie.

Je me demande parfois si nous réalisons la chance extraordinaire que nous avons de pouvoir participer à la messe ! Il y a trois ans, on a dû modifier les horaires des messes, sur un ensemble paroissial réunifié qui devenait trop grand pour nous ! J’ai vu et entendu des gens râler et refuser d’aller à la messe à 5 km de leur village… A ce moment, j’ai beaucoup rendu grâce pour mon enfance, quand, pendant les vacances d’été on devait rester dans le village natal de mon père, au fin fond du Congo, loin de la ville de Bukavu. Là-bas, nous devions faire 28 km à pieds, aller-retour pour aller à la messe ! Aujourd’hui encore, nombreuses sont les communautés qui font plus que cela, à pieds, dans la boue et sous la pluie, pour aller à la messe et recevoir le corps du Christ. Ils le font avec foi et grande joie, pour ces messes qui durent trois heures, sans râler, parce qu’ils savent que recevoir Jésus dans l’Eucharistie est une grâce extraordinaire et incommensurable.

Nous faisons des kilomètres pour aller au sport, au cinéma, faire du shopping, vivre nos passions… Mais combien de fois nous avons la flemme de quitter notre lit le dimanche pour aller à la messe, nous refusons d’aller dans le village voisin pour aller à la messe, nous restons chez nous parce que l’horaire de la messe ne nous convient pas, ou alors nous participons parfois à la messe avec tiédeur, indifférence, sans attention ! Cette fête nous appelle à la conversion mes chers amis ! Nous sommes sûrement indignes, en commençant par moi ! Mais, Jésus veut entrer dans notre cœur pour nous transformer, pour nous transfigurer, pour nous guérir. Jésus est le mendiant qui nous demande de l’accueillir avec foi, pour qu’il nous donne la joie et transforme nos vies.

Les deux prochains dimanches, 50 enfants de notre ensemble paroissial vont vivre leur première communion, en recevant Jésus à travers l’Eucharistie pour la toute première fois de leur vie. C’est un grand moment, une étape comparée jadis à un mariage ! Rappelez-vous que les enfants faisant la première communion étaient habillés comme des mariés, parce que à travers l’Eucharistie, une alliance est scellée entre le baptisé et le Christ, une union profonde se réalise, comme dans le mariage.

Parfois malheureusement, certains considèrent la première communion comme un diplôme, la célébration d’une fête d’un jour, sans lendemain, sans une relation intime nourrie pour la suite. Je voudrais confier ces enfants à la prière de chaque membre de notre communauté afin que chacun d’eux puisse laisser Jésus transformer sa vie et grandir en intimité avec Lui. Que le saint que nous allons recevoir dans l’Eucharistie en cette solennité du Saint Sacrement, que chacun le reçoive dans la foi. Puissions-nous dire, en le recevant, comme l’incrédule apôtre Thomas après la résurrection : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Amen.

Ancien curé de l'ensemble paroissial