C – 1 TC – « A l’image de Jésus, ne cédons pas aux tentations du Malin »

2019-03-11T18:19:30+01:0011 mars 2019|

Mes chers frères et sœurs ! Depuis le mercredi des Cendres, nous avons commencé le Carême, une période de quarante jours qui nous préparent aux fêtes pascales. En ce premier dimanche de carême, comme chaque année, nous contemplons le Seigneur dans le mystérieux épisode des tentations au désert. Cet épisode est tellement important qu’il est rapporté par les trois évangiles synoptiques. Saint Marc se limite à mentionner que Jésus fut tenté, sans donner de détails : «Aussitôt l’Esprit pousse Jésus au désert et, dans le désert, il resta quarante jours, tenté par Satan » (Mc 1, 12-13). Saint Matthieu et Luc précisent et décrivent les trois tentations de manière bien détaillée.

Au-delà de ces petites différences, ces trois récits ont quelque chose en commun : le fait paradoxal que même notre Seigneur Jésus fut soumis lui aussi, comme nous, aux tentations, c’est-à-dire, à cette possibilité malheureuse d’aller contre Dieu, voire même, de faire plier Dieu à son propre avantage, l’instrumentaliser.

Cet épisode est à la fois inquiétant et rassurant. Il est inquiétant parce qu’il nous montre la mystérieuse question de savoir comment, en Jésus -Dieu fait homme- pouvait coexister de manière paradoxale la perfection divine et la fragilité humaine. C’est un mystère présent dans beaucoup de pages de l’évangile. Comment est-ce possible que Celui qui manifestait la puissance divine dans la multiplication des pains et des poissons, celui qui guérissait les malades, voire même ressuscitait les morts… pouvait être fragile en ayant faim et soif, fatigue et angoisse, et toutes les manifestations de la fragilité humaine comme nous ?

Les tentations que nous méditons sont ce qui rend Jésus encore plus proche de nous. Jésus a été semblable à nous en toute chose, même dans les tentations, mais lui n’a pas péché. Il a combattu et vaincu les tentations. Alors, au début du carême, mettons-nous à son école et entrons dans le même combat avec lui contre toutes les tentations du Malin.

Dans cet épisode, Jésus est le modèle pour tout ce que notre humanité vit dans et à travers les diverses tentations du quotidien. La bonne nouvelle donc est que nous ne soyons ni scandalisés ni désespérés de nos tentations, car même le Seigneur n’y a pas échappé.

Dans cet épisode, nous voyions les trois dimensions des tentations, et donc malheureusement de péchés possibles que nous devons affronter dans notre vie : péché contre nous-même, contre le prochain et contre Dieu.

Contre-nous-même : « Pendant quarante jours, il fut tenté par le diable. Il ne mangea rien durant ces jours-là, et, quand ce temps fut écoulé, il eut faim. Le diable lui dit alors : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain. » Ici, nous sommes devant la tentation de ne penser seulement qu’à nos besoins premiers et primaires, à nos pulsions les plus élémentaires, nos besoins physiques et corporels : besoin naturel de manger quand nous avons faim, de boire quand nous avons soif, de répondre à nos envies et pulsions corporelles et physiques. Rien de mystérieux. En fait, quand nous ressentons un besoin à travers notre corps et nos différents sens, ceci parait irrésistible et c’est cela que Satan veut faire croire à Jésus. Le marketing et les publicités savent bien nous attraper par nos 5 sens : une musique, des odeurs précises, un visuel adapté… dans une structure commerciale, un magasin pour susciter le besoin et inciter ceux qui passent ou osent entrer à acheter.

Le temps de carême nous dit que nous pouvons mener ce combat qui voudrait nous limiter à notre seule dimension corporelle et physique. Nous ne sommes ni condamnés, ni conditionnés par nos seuls besoins physiques. Nous sommes capables de résister aux tentations corporelles et physiques. Le remède, c’est la fameuse formule spirituelle à vivre pendant le carême : « jeûne et abstinence » pour nous ouvrir à notre dimension spirituelle, aux besoins de l’âme comme Jésus le fait dans cet évangile : « Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain. », ce qui veut dire que nous valons plus que nos besoins physiques et corporels. Pouvons-nous essayer pendant ce carême de lutter contre toutes ces tentations physiques et corporelles en vivant un peu de jeûne et d’abstinence! Nous en sommes capables ! C’est une arme redoutable contre les tentations du Malin. Le père Pierre nous en a parlé à sa conférence de jeudi soir à Pechbonnieu.

Péché contre les autres : « Alors le diable l’emmena plus haut et lui montra en un instant tous les royaumes de la terre.   Il lui dit : « Je te donnerai tout ce pouvoir et la gloire de ces royaumes, car cela m’a été remis et je le donne à qui je veux. Toi donc, si tu te prosternes devant moi, tu auras tout cela. »

Telle est la deuxième catégorie des tentations : le pouvoir provoqué par notre orgueil et qui blesse les autres autour de nous. C’est la tentation de dominer, soumettre, commander les autres, les manipuler comme des objets entre nos doigts. Cela se vit en politique, mais aussi en famille, dans les relations professionnelles ou dans les affaires, et dans tous les secteurs de la vie, même dans l’Église. Toutes les cruautés et horreurs dont on parle actuellement dans l’Église trouvent en partie leur racine dans ce pouvoir que nous exerçons et dont nous pouvons abuser. En famille, tel conjoint qui veut montrer que c’est lui ou elle « qui porte la culotte », un autre qui manipule par un chantage en appuyant sur les faiblesses des autres, l’enfant qui terrorise ou manipule ses parents par ses larmes qui sont un grand instrument de pouvoir, le manager ou le chef qui écrase les membres de son équipe par la pression et les menaces de licenciement… Vendre son âme au diable pour avoir le pouvoir et garder ce pouvoir à tout prix !

Chacun de nous a un pouvoir, et en ce temps de carême, nous pouvons chacun nous demander combien et comment nous cherchons à nous imposer, à écraser les autres, de manière consciente ou inconsciente. Cela trouve sa racine dans l’orgueil, un péché capital qui est en chacun de nous, à petite ou à forte dose. Pour en guérir, contemplons et imitons : « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix » (Phil 2, 6-8) En ce temps de carême, nous le verrons laver les pieds de ses disciples et les appeler au service humble les uns envers les autres, porter sa croix, accepter toutes les humiliations par amour pour nous. Il est doux et humble de cœur ! Pouvons-nous lutter contre notre orgueil et demander la grâce de l’humilité en ce temps de carême, en acceptant ces petites humiliations qui nous blessent. Nous sommes tellement petits devant Dieu, le seul dont le pouvoir est sans limite. C’est seulement Dieu qui mérite gloire, louange et adoration !

Péché contre Dieu : « Puis le diable le conduisit à Jérusalem, il le plaça au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, d’ici jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi, à ses anges, l’ordre de te garder ;  et encore : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »

La troisième catégorie de nos tentations est cette sorte de vanité qui nous pousse à tenter même Dieu, à le rendre responsable et coupable de tous nos malheurs et des conséquences de nos propres péchés. Dès le péché originel, on chercher à responsabiliser Dieu de nos fautes : On le voit dans le récit d’Adam et Eve : « Le Seigneur Dieu appela l’homme et lui dit : « Où es-tu donc ? » Il répondit : « J’ai entendu ta voix dans le jardin, j’ai pris peur parce que je suis nu, et je me suis caché. » Le Seigneur reprit : « Qui donc t’a dit que tu étais nu ? Aurais-tu mangé de l’arbre dont je t’avais interdit de manger ? » L’homme répondit : « La femme que tu m’as donnée, c’est elle qui m’a donné du fruit de l’arbre, et j’en ai mangé. » Le Seigneur Dieu dit à la femme : « Qu’as-tu fait là ? » La femme répondit : « Le serpent m’a trompée, et j’ai mangé. » (Gn 3, 10-13) Bref, si nous en en sommes là, c’est la faute de Dieu a créé Eve, ou alors qui a créé le Serpent ! Nous nous dédouanons de toute responsabilité.

Dans cette tentation, le diable, ange déchu a compris que Jésus lui répond toujours en citant la Parole de Dieu. Alors il utilise et cite aussi la Parole de Dieu pour que l’homme tente son Dieu. C’est tellement sournois et malin. Satan cite quelques extrait du psaume 90 (8-13): « Il suffit que tu ouvres les yeux, tu verras le salaire du méchant. Oui, le Seigneur est ton refuge ; tu as fait du Très-Haut ta forteresse. Le malheur ne pourra te toucher, ni le danger, approcher de ta demeure : il donne mission à ses anges de te garder sur tous tes chemins. Ils te porteront sur leurs mains pour que ton pied ne heurte les pierres ; tu marcheras sur la vipère et le scorpion, tu écraseras le lion et le Dragon. » Quelle classe ! Satan qui cite par cœur la parole de Dieu… mais pour tenter le Seigneur et pour que Jésus culpabilise ensuite son Dieu.

Combien de fois nous procédons de la même manière : au lieu d’assumer nos comportements, nous accusons le Seigneur. Se jeter du haut du temple pour faire le beau, le fort, et prétendre que Dieu va nous sauver comme le suggère Satan, c’est vouloir éprouver Dieu, c’est chercher à le rendre responsables de toutes les conséquences de nos comportements à risque et dangereux et imputer cette responsabilité à Dieu qui ne nous a pas sauvé ! Je conduis sous l’influence de l’alcool, de la drogue, et si j’ai un accident, c’est Dieu qui est coupable et responsable car Il aurait dû faire quelque chose. Il y a tellement de guerres dans le monde, beaucoup de malheurs et de famine… et c’est toujours la faute de Dieu qui ne fait rien, qui reste passif, qui regarde, impassible, sans rien faire… au lieu de penser à notre responsabilité, nous qui refusons de partager, qui cultivons la rancœur et les jalousies, qui entretenons les guerres pour faire du profit en vendant nos armes.

En ce temps de carême, contemplons Jésus qui a été tenté comme chacun de nous, et qui nous montre que nous pouvons aussi vaincre ce combat contre le mal, car nous ne sommes jamais seuls. Depuis notre baptême, dans les sacrements, nous avons le Saint Esprit qui aide à combattre le mal et le péché. Que ce temps de conversion nous permettre de mener fermement ce combat contre le Malin pour grandir dans l’Amour de Dieu.