Conférence de père Cyprien Comte : Isaïe, Habacuc, Jérémie, trois prophètes qui vivifient notre foi

2019-03-30T08:08:06+01:0030 mars 2019|

 De l’attitude d’abandon d’Isaïe, gage de solidité dans la foi, à Jérémie qui lance tant d’avertissements et n’est pas entendu, en passant par Habacuc qui nous engage à être fidèle à Dieu même dans les pires moments, Père Cyprien Comte a feuilleté avec nous quelques très belles pages de l’Ancien Testament en cette soirée du 21 mars dernier. « L’homme croyant dans l’Ancien Testament », tel était le thème de cette 3è conférence de carême proposée par l’Ensemble Aucamville-Saint-Loup Cammas. En voici quelques échos pour mémoire et pour le plaisir de tous.

Retenons tout d’abord les mots de la foi, tels que nous les disent les prophètes dans l’Ancien Testament : avoir confiance ; s’abriter (trouver un refuge en Dieu) ; mettre son espoir dans le Seigneur (croire que Dieu va intervenir). Prenons le prophète Isaïe chapitre 7, versets 1 à 9 : le roi de Juda et son peuple ont peur -on est au 8è siècle avant J.-C. Ils viennent d’apprendre que Jérusalem, la capitale est attaquée par le royaume d’Israël. L’Histoire nous apprend que l’événement ne se produira qu’un siècle et demi plus tard. Pour l’heure, le royaume de Juda tremble de peur, et c’est joliment écrit :  « Alors le cœur du roi et le cœur de son peuple furent secoués comme les arbres de la forêt sont secoués par le vent ». Alors, le Seigneur envoie le prophète Isaïe avec son fils dire au roi de Juda : « Ne crains pas ». Faire confiance au Seigneur, rassurer, c’est aussi notre mission de baptisé, c’est ainsi que nous sommes nous aussi prophètes, en particulier avec les enfants, les adolescents qui ont besoin d’être rassurés, expliquait père Cyprien.

Grands et petits prophètes

Le Seigneur parle par le prophète, annonce non seulement que Jérusalem tiendra mais en plus, que le royaume d’Israël va disparaître. Mais il avertit aussi :« Si vous ne croyez pas, vous ne pourrez pas tenir ». Isaïe nous invite à mettre notre confiance, solidement et fermement dans le Seigneur qui entraîne une vraie stabilité : « tenir bon » comme une ville fortifiée. Comme une colonne de fer (Jr 1, 18) : c’est du solide ! En qui mettre notre confiance si ce n’est en Dieu et ses messagers. C’est ce qu’on exprime en disant « Amen ». Le mot « Amen » a la même racine que « fidèle » en Hébreu. C’est à la fidélité dans la foi que nous appelle le prophète Habacuc. Pas très connu ce prophète-

là ! Tournez les pages de votre Bible, vous le trouverez vers la fin l’Ancien Testament. Mieux ! Retenez qu’il y a 4 « grands prophètes », Isaïe, Jérémie, Ézéchiel et Daniel. Les trois premiers ont écrit et écrit… 52 chapitres dans le livre de Jérémie ! Et 12 « petits prophètes » (12 petits livres…). A l’Institut Catholique de Toulouse où il enseigne, père Cyprien interroge ses élèves qui doivent savoir leurs noms par cœur… et dans l’ordre : Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie.

Gilets Jaunes

Revenons à Habacuc, avec ce conseil de père Cyprien : si on veut se plaindre au lieu d’écrire au maire ou à son curé, on peut lire Habacuc ! Ce prophète dénonce la déroute de la justice… comme les Gilets Jaunes ! Il a des paroles de malheur, il ne comprend pas que Dieu n’intervienne pas. Ses interrogations sont modernes. Il reçoit une mission exceptionnelle : écrire sur une tablette comme Moïse ce que le Seigneur lui dit. On retiendra le verset 4, chapitre 2 : « le juste vivra par sa fidélité ». Le juste reste fidèle, nous explique le père Cyprien, il reste attaché à Dieu dans une relation vivante, une relation stable. Avoir la foi, pour certain, c’est l’évidence, pour d’autres, c’est plus ardu. Mais Dieu le sait, il nous demande de rester fidèle, juste, de tenir bon.

Quand Jérémie en a assez de faire le prophète !

On peut s’appuyer sur la foi de l’Église. Avec Habacuc, on comprend l’expérience d’Abraham (la foi et la justice) qui est ouverte à tous. La foi n’est pas réservé aux catholiques. Père Cyprien nous renvoie au Nouveau Testament, à Jésus qui s’étonne lui-même de la foi de certains comme le lépreux Naamam, le Syrien (Lc, 4, 25), guéri par le prophète Elisée (2R5, 19-27) ; comme la veuve de Sarepta (Lc4, 26) chez qui le prophète Elie trouve refuge (1R17. 10).

Si Isaïe s’adresse aux rois, Habacuc plus largement aux justes, Jérémie, lui, s’adresse à tous ! Il en a d’ailleurs assez de ne pas être entendu ni compris. Il porte la parole de Dieu mais cela lui vaut insultes et coups. On veut le tuer parce qu’il annonce la ruine et la chute du temple de Jérusalem. « Je ferai cesser dans les villes de Juda et dans les rues de Jérusalem les chants d’allégresse et les chants de joie, le chant de l’époux et le chant de l’épousée, car le pays ne sera plus qu’une ruine ».(Jr 7, 34 )

Pourtant, il continue, il n’abandonne pas son métier qui est de porter la parole de Dieu, d’appeler à la conversion. « Il est convaincu jusqu’à la moelle », nous dit père Cyprien citant le chapitre 20, 8-9 : « À longueur de journée, la parole du Seigneur attire sur moi l’insulte et la moquerie. Je me disais : « Je ne penserai plus à lui, je ne parlerai plus en son nom ». Mais elle était comme un feu brûlant dans mon cœur, elle était enfermée dans mes os. Je m’épuisais à la maîtriser, sans y réussir. »

Aujourd’hui, qui sont les messagers de Dieu ?

Alors il se défend : c’est pas moi ! C’est Dieu qui me dit de le dire ! « Mais sachez-le bien : si vous me faites mourir, vous allez vous charger d’un sang innocent, vous-mêmes et cette ville et tous ses habitants. Car c’est vraiment le Seigneur qui m’a envoyé vers vous proclamer toutes ces paroles pour que vous les entendiez. » (Jr 26, 15-26 ) !

Comme au temps de Jérémie, l’enjeu est la survie de notre société ici-bas et de notre vie. Nous, chrétiens, nous savons que l’enjeu pour nous est la vie éternelle. La conversion, personnelle et collective, est une condition pour la vie avec Dieu. Avec Jérémie, le peuple ne comprend pas. Et nous, aujourd’hui, est-ce qu’on comprend ? Est-ce qu’on entend les appels à la conversion ? Est-ce que les catastrophes écologiques par exemple qui nous sont annoncées, ne sont pas des paroles qui viennent de Dieu. Pendant le Carême, nous sommes appelés à nous convertir, à écouter les paroles de Dieu et à la transmettre à nos proches. Comme Jérémie aussi : à ne pas avoir peur !