Homélie 4è dimanche de l’Avent – année A

2018-01-28T20:19:40+01:0020 décembre 2016|

Mes chers frères et sœurs. Nous sommes à une semaine de Noël : temps des lumières, des sourires, des achats et courses pour les cadeaux de Noël… Mais Noël ne s’arrête pas là. C’est notre mission, nous qui sommes chrétiens, d’en témoigner dans notre société pour rappeler que cette semaine invite chacun à entrer dans l’espérance lumineuse de la venue imminente du Fils de Dieu, et que sa naissance est le plus grand cadeau que Dieu ait fait à l’humanité. Accueillir dans la foi l’enfant-Jésus comme Don du Père fait à l’humanité, voilà ce qui donne sens à tous les cadeaux que nous pourrons ensuite échanger à Noël.

Les prophètes comme Isaïe et Jean-Baptiste nous ont invités à attendre dans la joie ce Dieu qui brûle et illumine nos vies. Comme Marie, notre vie peut devenir la porte d’entrée de Dieu dans le monde. Si nous laissons le Christ naître en nous, comme Marie, les bienfaits de sa naissance jailliront et resplendiront sur ceux qui nous entourent. Il ne s’agit donc pas de faire semblant d’attendre, mais de manifester par notre vie et témoigner d’un Dieu né de la Vierge Marie, crucifié sous Ponce Pilate, mort mais ressuscité le troisième jour et toujours vivant en nous… Alors, chaque jour, nous sommes invités à laisser réellement Jésus naître en nos vies.

Même si parfois, comme Jean-Baptiste qui doute et demande à Jésus « es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre », nous sommes aussi traversés par des doutes, cette semaine nous invite à faire une place dans notre cœur, y construire une belle crèche afin que Marie et Joseph y déposent leur petit enfant Jésus, comme ils le firent à Bethléem il y a plus de deux mille ans.

On ne le dit pas assez, et la liturgie d’aujourd’hui nous le rappelle ! Joseph a aussi été traversé par de sérieux doutes. Quelqu’un disait de saint Joseph que c’est un pauvre type à qui Dieu a piqué la fiancée. C’est lui qui nous est présenté comme modèle à une semaine de Noël. L’évangile de ce dimanche nous présente saint Joseph, le Patron de l’Eglise, le père nourricier de Jésus, l’Epoux très chaste de la Vierge Marie… qui a dû radicalement changer sa vie après l’irruption de Dieu dans l’histoire d’amour qu’il vivait avec sa fiancée Marie. L’entrée de Dieu dans notre vie ne rend pas forcèment les choses plus faciles et plus simples pour nous, surtout quand nous refusons de lâcher prise. Saint Joseph a fait l’expérience d’un Dieu qui, quand il a décidé de mettre son nez dans nos affaires, nous bouscule, nous déprime parfois et provoque en nous quelques nuits d’insomnies… dans le but de nous amener, nous faire cheminer, de manière pédagogique et graduelle, petit à petit, à goûter à la Joie véritable de ceux qui lâchent prise et se laissent faire par Lui.

Contrairement à saint Luc qui nous parle du mystère de l’incarnation du Seigneur du point de vue de Marie, avec la contemplation des mystères joyeux que nous avons médités pendant la belle Marche de l’Avent de samedi dernier, l’Evangile de Matthieu nous raconte l’histoire de la naissance de Jésus du point de vue de Joseph. Saint Luc parle aux païens devenus chrétiens. Matthieu lui, s’adresse aux Juifs devenus chrétiens, en insistant, selon la culture juive, sur la place prééminente de l’homme, le père de famille, le maître de maison. Les prophètes avaient annoncé que le Messie devait être de la descendance de David, et c’est Joseph qui permet cette entrée généalogique de Dieu dans l’histoire de l’humanité.

Joseph est socialement de cette grande famille de noblesse de David mais n’a plus rien de noble que la « particule » de filiation, Joseph fils de David… Il tient sa petite entreprise de charpente et menuiserie et travaille le bois. Depuis quelques mois, à force de se croiser dans la rue et de se côtoyer à la synagogue, Joseph et Marie sont devenus amoureux. Il n’y a pas eu de coup de foudre, mais leur histoire est née et grandie petit à petit avec le temps. Leurs familles ont donné leur accord pour ce projet de mariage. Les fiançailles ont été célébrées et ils n’attendent que le jour J !

La très jeune et belle Marie de Nazareth est promise en mariage à Joseph, plus âgé qu’elle d’une vingtaines d’années peut-être! Pensez un peu au décalage physique, psychologique et affectif de ce couple. L’évangile ne nous le mentionne pas, mais la tradition dit que Joseph est probablement déjà veuf quand il rencontre Marie. Ce dernier fait de son mieux pour se montrer à la hauteur, ne pas décevoir les attentes d’une fille aussi jeune, pure, belle, et de surcroît vierge… Joseph met tout son cœur à préparer le grand événement. Mais voilà qu’à quelques mois du mariage, un drame survient dans la vie de Joseph. Sa fiancée est enceinte ! Ils ne se sont jamais connus sexuellement et Joseph attendait patiemment le jour J! Marie a beau lui dire qu’elle ne l’a jamais trompé, Joseph a du mal à comprendre cette histoire bizarre. Et pourtant, Joseph aime profondément Marie et ne veut lui faire aucun mal car elle risque la lapidation…

Joseph est en crise. Ca fait des semaines qu’il ne dort plus! C’est un homme profondément blessé, déshonoré qui déprime et se pose mille questions. Il désespère ! Il est en colère mais contrairement à nous autres, quand nous sommes profondément blessés, Joseph ne veut surtout pas se venger et faire du mal à sa fiancée.

Donc, notre Joseph déprimé a décidé d’aller voir le Rabbin de la synagogue de Nazareth pour lui annoncer qu’il ne voulait plus épouser Marie. Il doit inventer un mensonge : « Le mariage est annulé parce que je n’en peux plus d’elle ! Je suis fatigué de cette fille beaucoup trop jeune pour moi», raconte Joseph, pour éviter de donner les vraies raisons de cette annulation du mariage dans la dernière ligne droite. Cela au moins sauvera à la fois son honneur, sa fierté d’homme et épargnera Marie de l’humiliation et d’une condamnation publique. Joseph est juste parce qu’il laisse l’amour et la miséricorde prendre la première place, en épargnant sa fiancée, malgré son orgueil d’homme blessé.

Après des semaines de déprime et d’insomnie, Joseph pense avoir pris la bonne décision. Maintenant que la décision difficile est prise, il est soulagé. il peut à présent dormir et récupérer tout le retard de sommeil accumulé pendant des semaines de nuits blanches. Joseph dort comme quelqu’un qui a été bourré de somnifères et d’antidépresseurs…. Mais le sommeil de Joseph est troublé par un songe. Il rêve des anges qui le rassurent, « ne crains pas Joseph », lui donnent des explications mystérieuses, lui parlent d’un fils de Dieu qui sera appelé « fils du charpentier ». L’ange lui dit que Marie a accepté de donner corps à cet enfant par la force du Saint Esprit, et qu’il appartient maintenant à lui, Joseph, d’élever, nourrir, éduquer et prendre soin de cet enfant qui ne lui appartient pas.

Joseph est juste parce qu’il obéit à Dieu. Il a rêvé, et il entre dans ce rêve d’un projet décidé ailleurs, par Dieu. Joseph avait certainement des projets personnels : un magasin plus grand, une maison plus spacieuse, de nombreux fils et filles biologiques avec cette belle jeune Marie… Tout cela est tombé à l’eau. Dieu a besoin de lui, de son humilité, de sa force, de sa famille, de son travail, de son cœur, pour être le père d’un enfant qui ne sera pas le sien, pour être le mari d’une femme qu’il aimera silencieusement et chastement car elle est la Mère de Dieu. Joseph accepte le plan de Dieu et renonce à ses projets personnels pour réaliser le rêve de Dieu pour toute l’humanité.

Saint Joseph est le patron silencieux de ceux qui ont des projets personnels et qui acceptent que Dieu vienne tout perturber. Demandons son soutien pour les familles, en particulier pour les couples qui traversent un moment de crise de confiance dans l’amour et la fidélité, ces couples qui ne savent plus discuter, refusent de pardonner. Demandons le soutien de saint Joseph pour tous les pères et les mères qui adoptent, élèvent des enfants qui ne sont pas leurs enfants naturels. Prions saint Joseph pour tous les fiancés qui se préparent au mariage. Prions-le pour chacun de nous afin que nous sachions, nous aussi, prendre soin du Fils de Dieu, Jésus qui habite en nous depuis notre baptême, en l’aimant profondément. Amen

Ancien curé de l'ensemble paroissial