Frères et sœurs bien aimés, L’Évangile que nous venons d’entendre a de quoi nous surprendre, après avoir entendu hier soir le récit de la naissance de Jésus notre sauveur. Voici le prologue de St Jean qui nous fait prendre de la hauteur : une page d’Évangile pour contempler le dessein de Dieu depuis le commencement : depuis la Création.
Il y a quelques années j’ai compris qu’il fallait que je revienne chaque année à la messe du jour de Noël pour entendre cette merveilleuse introduction de l’Évangile de St Jean que nous appelons : le prologue : l’annonce du logos, La parole de Dieu, de Dieu qui se fait proche de nous et qui nous parle à travers ce petit enfant qui viens de naître. Le verbe de Dieu, c’est lui Jésus, l’Emmanuel, qui nous fait connaître Dieu le Père. C’est sa mission : nous faire connaître son Père.
L’histoire de notre humanité a un sens, une valeur, une portée, elle est l’histoire du Salut (Comment Dieu s’y prend pour sauver l’humanité). En lisant Henri-Irénée Marrou, Historien de l’Antiquité et admirateur des écrits de St Augustin, j’ai compris avec lui que l’histoire humaine peut être représentée comme un grand triptyque (définition : une œuvre peinte ou sculptée en 3 panneaux, dont les 2 volets extérieurs peuvent se refermer sur celui du milieu, qu’on trouve dans des églises au-dessus du maître autel) ; beaucoup de triptyque ont été peint au XV-XVIe siècle.
Sur le panneau de gauche se déroulent les siècles d’avant le Christ, les époques de L’Ancien Testament, ou Dieu dans sa lente pédagogie, de multiples façons, manières, disposent le genre humain à s’accorder au salut, et à faire alliance avec lui. Le logos, le verbe créateur n’a jamais abandonné les hommes aux puissances des ténèbres. L’essentiel de ce premier acte se joue dans l’histoire du peuple choisi : l’élu Israël, la promesse faite à Abraham, Foi des patriarches, l’Exode, le Sinaï et les tables de la Loi, le Roi David, le rappel de l’alliance par les prophètes, le petit reste d’Israël récupéré de la déportation à Babylone, l’attente de plus en plus impatiente du Messie se fait pressante chez les humbles du pays dans les derniers siècles avant la naissance de Jésus. Tout cela pourrait être représenté sur ce panneau (Temps pré christique)
Au centre du triptyque, un panneau charnière, essentiel qui tiens tout. Un temps très court, 33 années de la vie du Christ, sa vie publique quelques années (pensons aux 3 paques juives de la vie publique du Christ) ; L’incarnation, dont le prologue nous restitue l’essentiel : « Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous » (14) Le Verbe (La parole de Dieu) le Christ s’est fait homme d’une manière bien réelle, il a assumé les faiblesses et les limites de notre nature, à l’exception du péché.
Le Verbe éternel qui se fait homme pour chacun de nous et pour notre salut. Jésus-Christ s’est abaissé (la kénose) pour qu’à notre tour nos accédions à la divinité (St Irénée). Il a vécu l’humilité, l’humiliation, l’obéissance jusqu’à la mort sur une croix, cette croix du calvaire inséparable de la résurrection glorieuse. La vie du Christ remplit ce panneau central, rendu possible par le Fiat (Oui) de la vierge Marie et aussi celui plus discret de Joseph. Ce prologue que vous venez d’entendre dans cet Évangile de Jean manifeste qu’il y a un seul Dieu et un fils unique de Dieu, bien affirmé dans le credo de Nicée quand nous professerons notre foi tout à l’heure. Le Christ s’est incarné une seule fois, il a souffert une seule fois sous Ponce Pilate pour racheter les péchés des hommes et le salut a été définitivement acquis une seule fois. Incarnation et Passion du Seigneur ont eu lieu et la révélation est achevée.
Et sur le panneau de droite, le dernier volet de notre grand triptyque. Qui va depuis l’Ascension jusqu’à la Parousie, le retour glorieux du Christ à la fin des temps. C’est le troisième acte du plan conçu par Dieu, du grand drame de l’histoire humaine. C’est le temps de la nouvelle Alliance. Cette période de 2000ans dans laquelle aujourd’hui nous vivons à son rôle à jouer dans l’histoire du salut, c’est le temps de la mission, de notre sanctification (appel à devenir saint) c’est le temps de l’Église né à la Pentecôte.
C’est le temps de l’attente ou l’on guette le retour du maître de la vigne, l’arrivée de l’Époux, le temps ou veillent les serviteurs fidèles ou négligents, les vierges sages ou folles. C’est un temps de labeur ou nous sommes appelés à faire fructifier nos talents, nos dons, à travailler à la vigne du Seigneur quelle que soit l’heure à laquelle il nous a engagés. Ce temps de l’Église est celui d’une mystérieuse croissance, d’une lente maturité, ou croissent cote à cote le bon grain et l’ivraie. Le temps de l’Église est en cours, l’histoire n’est pas achevée. C’est le temps où se joue notre destinée.
Ce prologue de St Jean est lu en entier le jour qui célèbre la nativité du Seigneur. Le verset 12 est important, je le cite : « Mais tous ceux qui l’ont reçu, ceux qui croient en son nom, il a donné de pouvoir devenir enfant de Dieu »
Par le baptême, nous devenons enfant de Dieu. Jésus-Christ par son humanité est venu nous aider à renouer le dialogue avec Dieu, à retrouver cette relation filiale, confiante, sans ombre. « Ceux qui croient en son nom » ce sont ceux qui lui font confiance, qui marchent à sa suite.
Que ce temps de Noël qui dure 8 jours (Octave de Noël), nous permette d’aller contempler et adorer dans une des crèches de nos églises paroissiales : « Le Verbe qui s’est fait chair » Dieu est parmi nous, commençant sa vie d’homme en étant un tout petit enfant. Il n’y a pas besoin de s’évader du monde pour rencontrer Dieu. Car Dieu nous invite aussi à le rencontrer chez ceux qui souffrent plus particulièrement de solitude en ce temps de Noël ou les familles se retrouvent.
Bonne fête de Noël à chacun (e). Amen.
Théologie de l’histoire : Henri-Irénée Marrou.