Homélie XXVII dimanche – année C

2018-01-28T20:19:54+01:003 octobre 2016|

Mes chers frères et sœurs. Ces deux derniers dimanches, nous avons contemplé les disciples écoutant la parabole du gérant malhonnête et celle de l’homme riche et Lazare. Grâce à ces deux paraboles, les disciples avaient compris la récompense extraordinaire que perçoivent ceux qui vivent selon la Justice et la Vérité. Depuis, les disciples ont le cœur rempli d’un désir : celui de ce qui compte vraiment dans la vie. Le pape François nous rappelle sans cesse et nous invite personnellement et comme communauté ecclésiale à « revenir à l’essentiel ». C’est cet essentiel que les disciples recherchent quand ils font cette belle prière à Jésus : « Seigneur, augmente en nous la foi ! » Tout mon propos portera sur cette demande de la foi.

Il serait tellement beau que nous nous mettions dans les pas des disciples en demandant pour nous le don de la foi ainsi que sa croissance. N’oubliez pas que, quelques temps auparavant, ces mêmes disciples avaient douté, ce qui leur avait valu ce «grand reproche » de Jésus: « hommes de peu de foi ». A présent, ceux qui doutaient veulent grandir dans la foi, et je trouve cela très beau. Cette conversion des disciples passant du doute à la demande de grandir dans la foi nous invite à prier en particulier pour ces hommes et femmes en recherche qui, après une vie de doute ou de non-foi, ont découvert le chemin de la foi, ceux dont la foi balbutient comme des enfants qui apprennent à parler et qui deviennent, à l’étonnement de tous, de grands témoins de foi authentique et solide. Ils sont parfois autour de nous sans nous en rendre compte.

La foi nous est recommandée, en particulier dans les situations difficiles et éprouvantes car «rien n’est impossible à celui qui croit », une foi qui est capable de déplacer les montagnes. Dans l’évangile de ce jour, le Seigneur se refusant d’utiliser une telle expression… prend un exemple simple et humble : la graine de moutarde, plante qui n’était pas très appréciée à l’époque en Palestine. Il aurait pu prendre l’exemple du Cèdre géant du Liban…pour parler de la force de la foi. Non, le Seigneur parle de la graine de moutarde qui ne fleurit pas et ne donne pas de miel… ce qui est paradoxal dans ce pays où coulent le lait et le miel.

Cet exemple me donne le premier enseignement de ce dimanche. Nous sommes rassemblés pour l’eucharistie parce que nous croyons en Dieu, ou au moins, parce que nous espérons que l’eucharistie fait du bien à notre vie. Et nous avons raison de le croire parce que c’est la vérité. En prenant l’exemple de la graine de moutarde, le Seigneur nous rappelle que la vraie foi nous dépouille de toute tentation de suffisance. La foi ne se gonfle pas d’orgueil. Plus nous croyons, plus nous réalisons combien nous sommes tellement éloignés de Dieu. D’où cette demande à le chercher sans cesse, à grandir sans cesse, à marcher chaque jour car aussi longtemps que nous n’avons pas contemplé face à face le Visage de Dieu, pour le voir tel qu’Il est, nous devons Le chercher sans nous lasser et lui demander de se révéler pleinement à nous. Une foi orgueilleuse qui se croit dépouillée de tout doute, assise confortablement dans les certitudes, une foi qui méprise et humilie les autres, en particulier ceux qui ne croient pas…n’en est pas une ! Foi véritable et humilité vont de pair comme nous dit Marie dans le Magnificat : « Il s’est penché sur son humble servante » Combien de saints, comme Mère Teresa de Calcutta qui vient d’être canonisée, ont confessé n’avoir pas la foi pendant de longue année de leur vie !

Une autre caractéristique de la foi, c’est le témoignage qui doit en être rendu. Jésus lui-même disait à ses disciples qu’une lumière est faite pour allumer et éclairer. La lumière n’est pas à cacher sous le boisseau. « Vous êtes la lumière du monde, vous êtes le sel de la terre » nous dit Jésus. Le saint pape Jean Paul II, lors des JMJ de Toronto en 2002, avec sa voix tremblante mais forte et convaincue, disaient aux jeunes d’être sel de la terre et lumière du monde. Cet appel à une foi affirmée et témoignée semble s’opposer à la simplicité et l’humilité que j’ai soulignées dans le premier paragraphe.

Bien au contraire, nous ne devons pas taire notre foi. Nous ne pouvons pas ne pas dire notre joie d’avoir rencontré le Christ. Cela veut dire que pour que notre témoignage soit crédible, il ne peut se contenter des paroles ou d’une foi faite de formules et de concepts, d’une série de règles, de lois et doctrines bien définies derrière lesquelles nous nous cachons de manière confortable. La grande difficulté de notre société, c’est celle de confondre la religion et la foi. La foi des concepts théologiques, de quelques précisions catéchétiques, de formules liturgiques et des gestes liturgiques bien exécutés… cette religion-là est celle des pharisiens que Jésus a combattu jusqu’à payer de sa propre vie !

Beaucoup de gens se disent chrétiens parce qu’ils ont été baptisés un jour, parce qu’ils font partie d’une culture occidentale fondamentalement enracinée dans le christianisme (nous n’arrêtons jamais de le rappeler quand cela nous convient….politiquement), mais ces gens n’ont pas la foi parce qu’ils n’ont plus aucune relation personnelle et existentielle avec le Christ. Le pape Benoît XVI disait que la foi chrétienne n’est pas une adhésion à une doctrine ou à des dogmes, mais une rencontre personnelle et existentielle avec le Christ. Ceci signifie que notre foi doit être enracinée dans la rencontre, la relation personnelle et existentielle avec Jésus, pour pouvoir dire au monde : « Oui, la vie s’est manifestée, nous l’avons vue, et nous rendons témoignage : nous vous annonçons la vie éternelle qui était auprès du Père et qui s’est manifestée à nous. Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons à vous aussi, pour que, vous aussi, vous soyez en communion avec nous. Or nous sommes, nous aussi, en communion avec le Père et avec son Fils, Jésus Christ. Et nous écrivons cela, afin que notre joie soit parfaite » (1Jn 2-4).

La foi ne peut pas être timide ou timorée. L’essence même de la foi nous envoie vers les autres pour leur témoigner de cette joie qui nous habite, celle que ne cesse de rappeler le pape François et qui transparaît dans le film en salle actuellement : « Le Pape François » que je vous invite à aller voir. Dans son exhortation apostolique « La joie de l’Evangile », le pape François insiste sur le témoignage d’une foi joyeuse qui nous vient de la relation personnelle et existentielle avec le Christ. Il dit : « J’invite chaque chrétien, en quelque lieu et situation où il se trouve, à renouveler aujourd’hui même sa rencontre personnelle avec Jésus Christ ou, au moins, à prendre la décision de se laisser rencontrer par lui, de le chercher chaque jour sans cesse. Il n’y a pas de motif pour lequel quelqu’un puisse penser que cette invitation n’est pas pour lui, parce que « personne n’est exclu de la joie que nous apporte le Seigneur ». (3)

Nous sommes donc appelés à quitter cette peur et cette timidité qui caractérisent les chrétiens Français… ce qui nous interdit d’affirmer notre foi autour de nous, dans nos cercles d’amis, nos familles, nos milieux professionnels. Saint Paul aussi nous invite à le faire dans la Deuxième Lettre à Timothée : « Car ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné ,mais un esprit de force, d’amour et de pondération. N’aie donc pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur ». Il est dramatique de voir les chrétiens qui remplissent nos églises mais qui ont honte de témoigner de leur foi. Pourtant, l’expérience a montré que les chrétiens qui disent leur foi, qui l’affirment sans agresser les autres, qui témoignent humblement au travail et en famille… ceux-ci deviennent ensuite des oreilles attentives auprès desquelles beaucoup viennent se confier, demander le soutien de la prière, pour leur familles, amis et collègues. Je rappelle néanmoins que ce témoignage de foi doit être humble et sans orgueil, sans écraser ceux qui nous entourent.

Mes chers frères et sœurs ! Demandons au Seigneur, avec les disciples : « Seigneur, augmente en nous la foi ». Tu nous l’as donnée toi-même par la grâce du baptême, donne-nous de la faire grandir en te cherchant chaque jour, en particulière quand tu sembles éloigné de nos épreuves. Donne-nous le courage de témoigner de toi, humblement, simplement, mais avec force, de manière crédible, pour que le monde voie la joie qui nous habite, dont la Source et l’Auteur ne sont rien d’autre que, toi ! Donne à ceux qui te cherchent de te trouver pour que leur joie soit parfaite. Amen.

 

Ancien curé de l'ensemble paroissial