Homélie du VIIIè dimanche du temps ordinaire – Année A

2018-01-28T20:19:37+01:001 mars 2017|

(Institutions des quatre diacres et lecteurs, Lalande, samedi 25 février 2017)
Jésus ne veut pas que nous nous fassions du souci (ce mot est repris six fois dans l’évangile de ce dimanche).
Il veut que notre regard se tourne plus vers le Père céleste que vers des préoccupations matérielles concernant la nourriture ou les vêtements.
Est-ce à dire que nous devrions nous laisser aller à l’insouciance ? Jésus ne nous invite pas à la négligence. Quand on est père et mère de famille, on doit se soucier de la nourriture, de l’habillement, de la maison, de son entretien, de la beauté simple d’un accueil quotidien et constant. Jésus veut seulement nous dire qu’il ne nous faut pas nous préoccuper outre mesure de tout cela et surtout que nous devons veiller à honorer des priorités.
Notre confiance doit surtout se porter vers le Père céleste, qui se soucie de nous. Il ne nous oublie pas, comme nous l’a rappelé de façon bouleversante la première lecture : « Une femme peut-elle oublier son nourrisson, ne plus avoir de tendresse pour le fils de ses entrailles ? Même si elle l’oubliait, moi, je ne t’oublierai jamais -dit le Seigneur » (Is 49,15). Ces paroles nous révèlent dès l’Ancien Testament la tendresse maternelle de notre Père des cieux. C’est lui qu’il nous faut regarder, c’est à lui que nous devons faire confiance, comme Jésus, qui n’est que regard vers son Père, attention à sa Parole et obéissance à sa volonté.
« Jette ton souci dans le Seigneur, et lui te nourrira », chante le Psaume 55 (23). Il faut de la force d’âme pour ne pas sans cesse revenir sur ce qui nous inquiète, comme on gratte un bobo. L’image du psalmiste est très belle : larguons nos soucis, jetons-les dans le cœur de Dieu. Faisons-lui confiance. Sœur Faustine, la première sainte canonisée du 3è millénaire, a recueilli de Jésus lui-même cette invocation, qui a été au centre des Journées mondiales de la jeunesse de Cracovie, l’été dernier : « Jésus, j’ai confiance en toi ! ». Il craque, comme on peut en faire l’expérience , quand on l’invoque avec cette prière réitérée.
Chers amis candidats au diaconat, vous avez pu être inquiets quand vous avez entendu, venu d’un prêtre ou de chrétiens, un appel à vous mettre en route vers le ministère ordonné. Vous vous êtes demandé si une telle orientation était compatible avec le lien, sacré lui aussi, du mariage. « Nul ne peut servir deux maîtres », comme nous l’entendons ce soir : le célibat est requis pour les prêtres et pour les candidats non mariés. Nous sommes témoins des inquiétudes des épouses elles aussi. C’est une vraie question que nous n’avons pas éludée. Le mariage est un engagement sacré pour votre couple, qui scelle aussi vos devoirs, vos liens de famille ; il ne saurait être mis au second plan, à tel point que la préparation au diaconat met en route, avec vous, vos épouses, dans une même formation. Leur consentement est nécessaire à toutes les étapes ; il est une condition, manifestée au début de la célébration, au jour de votre ordination. Ce ne sont pas deux maîtres que vous devrez servir, mais le même, dans une continuité différenciée. Dans le mariage, vous êtes le signe du Christ Époux, qui se donne à l’Église son épouse :« ce mystère est grand », comme l’écrit saint Paul dans sa lettre aux Éphésiens (5,32). Devenus diacres, vous serez le signe du Christ Serviteur, lui qui n’est pas venu pour être servi mais pour servir, signes en vos personnes de cette dimension de service qui est au cœur de tout ministère sacré.
Institués lecteurs dans un instant, vous aurez à transmettre la Parole de Dieu, ce qui suppose que vous soyez d’abord un disciple, qui laisse le Seigneur lui ouvrir l’oreille chaque matin. En amont ou en aval de la Parole de Dieu, vous saurez écouter ceux que Dieu met sur votre chemin, dans votre vie familiale, professionnelle, associative, pour les entendre et les comprendre comme l’écrit l’un de vous. Ce sont les dispositions nécessaires pour être un « disciple missionnaire » et apprendre aux autres à le devenir chaque jour.
Un authentique lecteur de la Parole ne peut que marcher dans le sens qu’elle indique : « Ta parole est la lumière de mes pas, la lampe de ma route », chante le psaume 118 (105), au cœur d’une longue méditation. L’acolyte est, littéralement, d’après le sens du mot grec, non un « suiveur » , mais quelqu’un qui écoute l’appel de Jésus : « Suis-moi ! ».
Vous me dites que cette transmission de la Parole de Jésus est « indicible », comme aussi la distribution du Corps du Christ. Cette unique et double expérience vous met en proximité du Seigneur Serviteur qui se donne jusqu’au bout. Il s’agit bien d’un amour à connaître, à reconnaître à faire connaître.
Vous êtes quatre à être institués ce soir, comme nous avons quatre Évangiles, quatre grands premiers conciles œcuméniques (Nicée, Constantinople, Éphèse et Chalcédoine), quatre grandes constitutions de Vatican II (sur l’Église, la Révélation, la liturgie, le service au monde). Vous vous réjouissez, avec vos épouses, de la fraternité qui unit la famille diaconale : elle me réjouit profondément. Si les uns et les autres, les unes et les autres, vous avez pu êtres inquiets, inquiètes, vous n’avez plus ce souci. « Le temps de préparation est comme un accouchement » m’écrit une épouse ; une autre formule cette réflexion : « Dieu ne choisit pas ceux qui sont capables, mais rend capables ceux qu’il choisit », qui retrouve une pensée de saint Augustin. Laissez-vous conduire par l’Esprit dans cette paix profonde qui saura se déployer, comme vous le sentez , en bienveillance, en retenue, en justesse et en sagesse, pour devenir bientôt, selon les mots de Paul en la deuxième lecture, « les auxiliaires du Christ et les intendants des mystères de Dieu » (1Co 4,1). Amen

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